lundi 9 décembre 2013

Mémoires d'immortels, par Christelle Verhoest



Quatrième de couverture :
« Janvier 1914, palais d’hiver de St-Pétersbourg.
Lilia Andreïvna Oliakov, 15 ans, fait la connaissance de Julius Rassenko, un garçon aux yeux saphir brûlants… surnaturels. Il l’intrigue et l’inquiète. Puis il disparaît de sa vie durant deux ans, jusqu’à ce que la jeune fille tombe à nouveau sur lui. Il est en compagnie de son frère, qui semble encore plus effrayant.
La Révolution gronde et, à plusieurs reprises, Lilia se retrouve face à une panthère au pelage doré et aux yeux saphir, un animal qui n’a rien à faire là. Séparée des siens, réfugiée en France, Lilia retrouve Julius. Il n’a pas changé.
Dès lors, la jeune fille va entrer dans un monde dont elle ne soupçonnait pas l’existence, celui de Julius, qui n’est pas humain, et qui souhaite faire d’elle sa compagne. Sauf que cet acte s’oppose aux règles ancestrales que Levdia, le frère de Julius, est déterminé à faire respecter. Quitte à manipuler… et à tuer.
Lilia ne se détourne pas de son objectif : protéger la famille qu’elle s’est créée. Quel rôle Julius a-t-il à jouer? Et Levdia? Entre la France et New York, parviendra-t-il à éliminer Lilia et ses descendants? »


Mon avis :
Humpf.

J’avoue que je ne sais trop que penser de ce livre.

J’étais très emballée à l’idée de commencer ma lecture; une couverture magnifique, une quatrième de couverture intrigante et une auteure que j’ai découverte avec la série Les enfants de l’océan (tome 1 ici), que j’ai adorée. Sans m’attendre à une histoire du même genre – j’espérais même quelque chose de complètement différent –, j’avais bon espoir de retrouver les mêmes qualités qui m’avaient tant fait apprécier ma lecture des Enfants de l’océan dans ce nouveau roman. Alors… déception? Oui, un peu.

Au premier abord, j’ai été intriguée et même captivée par les premières pages de Mémoires d’Immortels. Le prologue est raconté du point de vue de Johan, un personnage masculin qui tombe sur Lilia par hasard, lors de l’arrivée de la jeune fille en France. Celle-ci semble perdue et Johan va donc l’aborder, lui demander comment elle s’est retrouvée là, et accompagnée d’un petit garçon qui dépend d’elle, qui plus est. Lilia lui répond « qu’il ne la croirait pas si elle lui racontait ». Johan insiste néanmoins et c’est ainsi que Lilia commence son récit…

Dès lors, l’histoire est racontée au « Je », du point de vue de Lilia. J’ai bien aimé suivre les péripéties de la jeune fille à travers ses yeux, même si j’ai mis du temps à m’attacher à elle. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce n’est toutefois pas à cause d’elle. La jeune fille agit de façon capricieuse à quelques reprises et c’est plutôt agaçant, c’est vrai. Le problème ne réside cependant pas là, à mon avis : tout au long du roman, on donne beaucoup de détail sur l’Histoire, la politique, l’économie et tout. Cela donne une touche intéressante au récit, qui débute durant la Révolution Russe. Ça permet au lecteur de se situer, de comprendre l’ambiance du roman, c’est vrai. Pourtant, il me semble que l’auteure a mis bien trop de détails pour la pertinence qu’ils avaient. Plutôt que de s’acharner à décrire tout ce qui se disait et tout ce qui se faisait durant la Révolution, j’aurais aimé que Verhoest nous en apprenne plus sur l’univers complexe qu’elle a créé pour Mémoires d’Immortels, et qu’elle aborde plus souvent les sentiments de ses personnages.

Résultat : alors que la narration est au « Je », j’ai plutôt eu l’impression que tout le récit était survolé et raconté par un élément extérieur. Lilia a été longtemps une étrangère pour moi. De plus, les éléments fantastiques du roman m’ont donné l’impression d’avoir été jetés là, au hasard. Le tout manquait énormément de structure et toute cette histoire concernant les Immortels m’est restée floue pendant la majorité du roman. Difficile, donc, de se laisser emporter par le récit.

Difficile aussi à cause du manque extrême de fluidité de ce roman : tous les évènements s’enchaînent et déboulent sans la moindre connexion entre eux – ou du moins, sans une connexion expliquée. Si le lien entre certaines péripéties est visible, sans être évident toutefois, d’autres sont complètement inexistants. Ainsi, dès leur première rencontre, Julius – ce fameux inconnu aux yeux saphir et qui s’avère être un Immortel – décide de faire de Lilia sa compagne pour l’éternité. Sans même lui avoir adressé la parole – et c’est la même chose pour Lilia. Elle s’est soudainement éprise de ce jeune homme qui lui a un jour tiré sa chaise pour qu’elle puisse s’asseoir à table… Moui. Bien sûr. Et tout au long du roman, elle ne fait que repousser les avances de Julius, prétendre qu’elle le déteste, qu’il lui fait peur… Mais ne cesse de penser à lui et de se demander où il est et ce qu’il fait quand il n’est pas là pour veiller sur elle…

Et cela ne s’arrête pas là! Ça, c’était côté réaction et émotions des personnages. Mais ce même problème revint lorsqu’il est question de la narration du roman, de l’histoire en elle-même. Voyez-vous, de la première à la dernière page du livre, il s’écoule 100 ans. Si, si. Rappelez-vous qu’on parle ici d’Immortels. Seulement, il arrive que plus de 20 ans se soient écoulés entre deux chapitres sans qu’on parle de ce qui s’est passé pendant ces 20 années. Et après, vous voulez que je me repère dans l’histoire et que j’y adhère? Vous vous foutez de moi?!

Comme si ce n’était pas suffisant, il faut en plus qu’il y ait quatre narrateurs différents! QUATRE! Qui sont tous plus confus les uns que les autres! Nous avons tout d’abord Lilia, qui nous raconte comment elle a rencontré Julius, comment elle a découvert qu’il était un Immortel et comment, à cause de la Révolution, elle a dû fuir la Russie. D’accord. Son histoire, bien qu’extrêmement décousue, est aussi plutôt palpitante. Mais comme on s’attache tout juste à notre héroïne et qu’on commence à comprendre tous ces trucs d’Immortels, BAM! On change de narrateur. Et à qui l’honneur? Johan. Alors là, je n’y ai rien compris, rien du tout. Ce choix m’a profondément énervée, pour ne pas dire qu’il m’a royalement emmerdée, oui. Voyez-vous, Johan est un humain, un simple humain. Qui, en plus de ne pas comprendre grand-chose au monde des Immortels, ne veut pas en entendre parler – alors qu’il a mariée l’une d’elle. Oui, vous avez bien compris, Lilia et Johan se sont mariés – rassurez-vous, aucune surprise là-dedans, ça se produit dans le premier 1/3 du récit. J’avoue avoir plusieurs problèmes avec ce dénouement : tout d’abord, Johan n’est pas charmant. Je n’ai donc pas apprécié ma lecture de son point de vue. C’était encore plus « extérieur » que ça l’était au début, vous imaginez? Ensuite, je n’ai pas du tout, mais pas du tout adhéré à la romance entre Lilia et Johan. On s’apercevait bien que ce dernier aimait Lilia, mais elle? Toujours préoccupée par Julius, à savoir ce qu’il devenait après toutes ces années passées loin d’elle. C’est à peine si on pouvait sentir un peu de tendresse à travers les gestes qu’elle posait envers Johan. Et finalement : Johan est un HUMAIN. Il n’est PAS le héros. Il ne sait presque RIEN de l’univers des Immortels, qui est l’univers du roman. Alors dîtes-moi pourquoi, POURQUOI, en avoir fait le narrateur de toute la foutue moitié du foutu roman???

Ensuite vient le troisième narrateur : Ivanna, qui n’est nulle autre que la petite-fille de Lilia et de Johan – oui, ils ont eu un enfant, une fille qu’ils ont eu la brillante idée d’appeler Johanna. JOHANNA. Alors que son père s’appelle Johan! PITIÉ!!! Bref. Passons. À partir du moment où nous suivons l’histoire du point de vue d’Ivanna, bien des choses sont devenues beaucoup plus intéressantes. Ivanna étant celle qui veut trouver et affronter Levdia, le frère de Julius, qui a juré de tous les tuer un par un, le récit s’est mis à présenter beaucoup plus d’action. Levdia commence à envoyer ses sbires pour faire souffrir Lilia et ses descendants, mais Ivanna refuse de se laisser faire. Alors oui, enfin un peu de rebondissement, mais toujours aussi inégal et décousu.

Le dernier narrateur n’en est en fait pas vraiment un. Si la majorité du roman est écrit au « Je », quelques passages sont écrits à la troisième personne. Dans ce cas, je n’ai toutefois pas compris l’utilité de certains narrateurs – je pense surtout à Johan, en fait. Car, dans les rares moments d’action présents dans les passages où le jeune homme est le narrateur, il n’est pourtant pas le héros. Ainsi, nous passons plusieurs chapitres avec Johan, où il attend que Lilia revienne d’une de ses escapades nocturnes. Il se tourne les pouces et le chapitre se termine sur un « ce qui s’était passé pendant son absence, Lilia me le raconta ». Et le chapitre suivant raconte la fameuse escapade de Lilia, mais est écrit à la troisième personne. Alors je me demande : à quoi Johan a-t-il servi à part à m’emmerder? En fait, si on oublie le fait qu’il est la seule raison pour laquelle Lilia ne s’est pas unie à Julius, et que c’est lui qui l’a mise enceinte… Johan n’a été d’AUCUNE utilité dans le roman. Alors pourquoi nous torturer avec sa seule présence???

Bon, je m’aperçois que cette chronique se fait horriblement longue. Alors je ferai de ce paragraphe le seul où je soulèverai des points positifs : malgré tous ses défauts, Mémoires d’Immortels comportait un certain degré d’action et d’excitation. J’ai mis du temps à m’immerger dans l’histoire et lorsque ç’a été fait, j’ai été coupée dans mon élan par ces affreux chapitres où le narrateur était Johan. Après ce 2/3, toutefois, les pages se sont tournées beaucoup plus facilement. Les péripéties étaient également plus fluides qu’au début du roman – je ne saurais expliquer pourquoi, mais c’était le cas – heureusement. Et, à part Johan, j’ai plutôt aimé les personnages – même s’il n’est pas le seul que j’ai trouvé inutile à l’histoire. J’aurais aimé voir Julius plus souvent, cet Immortel aux yeux saphir qui, même avec ses rares apparitions, a réussi à me charmer. Je suis heureuse de la façon dont se termine l’histoire, mais j’avoue ne pas comprendre pourquoi l’auteure a mis tout ce temps à installer ce dénouement. Il me semble qu’à des dizaines de reprises, cette fin s’est montrée accessible aux personnages.

En résumé, j’ai apprécié Mémoires d’immortels, ou du moins certaines parties. Je crois que ce roman avait un potentiel énorme, un potentiel qui n’a pas été exploité. Je suis donc un peu déçue de ma lecture, et pas seulement à cause des attentes que j’avais après avoir lu Les enfants de l’océan. Entre les longueurs, le manque de fluidité et de logique, le choix de narration que je n’ai ni compris ni aimé, et cet arrière-goût de tourner en rond que m’a laissé la conclusion… Il y a eu quelques moments forts lors de ma lecture, mais malheureusement, mon plaisir n’a pas été constant. Je suis presque heureuse que Mémoires d’immortels soit un livre unique, car j’aurais redouté la suite…

Ma note : 2.5/5


Merci aux Éditions AdA pour ce livre!



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